Ils ont été effacés, mettons-les en lumière

Frédérique

Orthophoniste (Rhône)

« Les personnes qui n’ont pas été touchées par cela n’imaginent pas la violence de ce qu’on a vécu. »

Frédérique a 53 ans, elle est mariée. Après presque 30 ans d’activité, elle est interdite d’exercer depuis décembre 2021.

Je faisais 3 jours en cabinet et le reste de la semaine en SESSAD généraliste (Services d’Education Spéciale et de Soins A Domicile).

J’ai travaillé comme ça en mixte jusqu’au mois d’avril dernier, puis j’ai quitté l’institution au moment de la réforme SERAFIN. J’ai eu une formation et ce que j’en ai compris c’est qu’on ne considère plus l’être humain dans sa globalité. On le définit en termes de besoins. Il a besoin de ça et de ça, et en face il faut pouvoir cocher qu’on a répondu à ses besoins. Tout le service était démantelé, tout changeait et ça ne me convenait pas. Et puis, la façon dont l’institution nous traitait, je trouvais cela insupportable. Je suis partie et bien m’en a pris, parce que j’ai gardé des contacts avec quelques collègues et depuis le mois de Septembre c’est Pass tous les matins !

J’adorais le travail pluridisciplinaire, mais je voyais poindre, avec les lois en cours, la chute du médico-social et j’avais le sentiment qu’on n’allait nulle part. Je n’avais pas envie de travailler comme ça. Dans mon idée, au sein d’un cabinet je pourrais travailler comme je l’entendais. J’ai donc fait le choix de m’installer en libéral, pensant que je serai tranquille. Et finalement non…

A partir du 13 juillet, je me suis enfoncée dans une espèce de dépression, je pense qu’on peut le dire comme ça, mais avant que je réalise ce que c’était… Après les vacances, ça m’a fait du bien de retravailler, de voir les patients, mais c’était quand même super dur d’aller bosser, sans savoir… dans l’attente du courrier… J’ai pris sur moi pour aller mieux. J’ai pu continuer jusqu’à la fin de l’année puis les lettres, les avis recommandés sont arrivés au mois de décembre et c’était d’une violence extrême.

Dans le cabinet je où travaillais, il y avait des médecins, des ostéos et une psychologue. A partir du jour où je leur ai annoncé, expliqué, que je ne pourrai pas faire cette injection, j’ai été agréablement surprise parce qu’ils ont accepté, alors qu’ils vaccinaient à gogo. Tant que je travaillais ils ne m’embêtaient pas, ça se passait bien, même si je n’ai pas essayé de discuter avec eux, parce que j’en avais parlé au mois de juillet avec une qui prônait la vaccination (y compris pour les femmes enceintes) et là c’était compliqué. On n’était pas sur la même longueur d’ondes.

Mais à partir du moment où j’ai eu l’interdiction d’exercer, c’est devenu difficile. J’aurais peut-être pu rester dans mon bureau et exercer une activité non médicale, en faisant toujours ce que je faisais mais différemment, sous forme d’accompagnement à la scolarité, à la parentalité. Ce sont des choses que je sais faire, qui demandent peu d’efforts, mais ce n’était pas la bonne idée, ça leur posait un problème. Bon, on va dire que ça aide à tourner la page…

Donc un jour je me dis « Tu restes dans ce que tu sais faire » et pour l’instant je dépanne des gens bénévolement, des patients qui sont proches, qui n’arrivent pas à faire la démarche d’aller chez un autre professionnel. Et puis il y a des jours où je me dis qu’il faut passer à autre chose, mais honnêtement je ne sais pas.

Mars 2020, premier confinement ! Sidération, la trouille ! Je flippais ! Qu’est-ce qu’on va attraper, c’est quoi cette maladie qui nous tombe dessus ? Et puis finalement tu retravailles, pendant un an avec des enfants, dans des écoles, tu ne tombes pas malade, et tu te dis tiens, c’est bizarre ce truc… Et puis le vaccin sort, avec une autorisation de mise sur le marché conditionnelle… Et là tu te dis ça ne m’inspire pas confiance, ce truc-là. Et puis la façon dont ça se passait aussi… Aux Etats Unis les gens qui allaient se faire vacciner avaient le droit à un donut par jour. Et là tu te dis « mais ce n’est pas médical, c’est du business ! »

Et puis tous les centres de vaccination, ce n’est pas ma représentation du soin ça ! Avec tout ce qui se mettait en place j’ai très vite été méfiante. Je sais bien, par expérience, qu’il y a tout un tas de produits dangereux et que ça ne gêne personne de les refiler aux petites gens.

Le 15 septembre il ne faisait pas beau, c’était un jour terrible. J’ai eu le malheur de manger toute seule devant mon ordinateur, de voir les infos, tous les soignants suspendus. Et moi je travaillais encore ! Oh la vilaine, je suis mauvaise, je ne vais pas pouvoir continuer à travailler alors qu’il y a tant de soignants suspendus. Alors le soir du 15 septembre, j’ai cliqué sur Doctolib et j’ai réussi, non sans mal, à prendre RDV pour me faire vacciner le vendredi.

Le jeudi matin je pleurais dans mon lit, ma sœur m’a appelée et m’a dit « Mais ça ne va pas cette histoire ». Le jeudi après-midi je suis partie travailler, j’avais mal à la tête, j’avais la nausée, je ne tenais pas debout, je n’étais pas bien du tout. Et après ma journée de boulot j’ai eu un contact avec une collègue ortho qui avait arrêté de travailler et qui m’a dit « Non mais ça ne va pas, ne t’inquiète pas tu n’es pas toute seule ». En fait, jusqu’ici je me croyais seule, comme une extraterrestre, sans personne dans le médico-social ni dans mon entourage qui comprenait le désarroi dans lequel cela me mettait. Et cette collègue me dit « Mais tu n’es pas toute seule, on est nombreux, des non vaccinés qui continuent, des non vaccinés qui arrêtent, des filles qui se sont fait vacciner la mort dans l’âme. » Elle m’a mise en contact avec un groupe d’orthos et là, la révélation ! Alors j’ai annulé mon RDV sur Doctolib et le lendemain matin j’étais en pleine forme.

Je ne voulais pas de ce vaccin parce que je n’avais pas confiance et mon corps n’en voulait pas non plus. Je ne le voulais pas et je n’ai pas pu. Après on s’est dit on va attendre le nouveau vaccin, plus traditionnel, mais c’est de la saloperie aussi et puis pour une maladie qui ne présente aucun réel danger pour moi. C’est tellement incompréhensible.

Quoi dire d’autre ? Je suis admirative des personnes qui ont tourné la page, moi je n’y arrive pas, j’ai vraiment besoin de temps pour panser mes blessures.

Je participe à ce projet de témoignages parce que toutes les personnes qui n’ont pas été touchées par cela n’imaginent pas la violence de ce qu’on a vécu.

On s’en remettra, oui on va continuer, mais je n’ai jamais rien vécu d’aussi violent.

Témoignage recueilli en mars 2022