Ils ont été effacés, mettons-les en lumière

Célia

Assistante administrative (Yvelines)

« Nous n’avions pas le droit de faire venir des proches de l'extérieur. En revanche, on faisait entrer des cas COVID que nous envoyaient les hôpitaux. »

Célia a 56 ans, elle vit en couple. Elle a deux enfants (une fille de 16 ans encore à charge). Elle était secrétaire au bureau des entrées dans un EHPAD, en CDI depuis le 1er janvier 2020. Elle a été licenciée le 12 novembre 2021.

J’étais secrétaire au bureau des entrées. Je m’occupais, entre autres choses, des admissions, des départs, dont les décès. Au mois de mars 2020, lors de la première vague, c’était très compliqué car le public de ce genre d’établissements est un public très fragile et les résidents ont été les premiers touchés par le COVID. J’ai le souvenir d’un week-end de 3 jours, à Pâques. La maison de retraite médicalisée compte 324 résidents et recense normalement entre 6 et 8 décès par mois. Ce week-end-là, en 3 jours, quand mes collègues et moi sommes revenus le mardi il y avait eu une vingtaine de décès.

Nous étions 4 personnes à traiter tous les dossiers. Nous n’avons fait que ça non-stop et donc nous avons essayé de laisser le côté psychologique et de ne se préoccuper que du côté administratif.

Nous n’avions pas le droit de faire entrer de nouveaux résidents, c’était blackout. On ne pouvait plus faire de visites, ni accueillir les bénévoles pour aider dans les activités d’animation, rien. Toutes ces personnes-là qui sont décédées, nous n’avions pas le droit de faire venir des proches de l’extérieur. En revanche, on faisait entrer des cas COVID que nous envoyaient les hôpitaux pour combler les places des résidents qui était décédés, parce qu’il fallait bien rentabiliser, remplir.

Donc en fait nous ne faisions entrer que des personnes positives au Covid, nous faisions venir des personnes qui avaient des problèmes, des cas COVID qui auraient dû être à l’hôpital. Mais même si nous sommes une maison médicalisée, ce n’est pas un hôpital ! Donc ces personnes-là, je ne comprenais pas qu’on les fasse venir. Pourquoi pas plutôt dans des cliniques où il y a tout l’équipement nécessaire, tandis que dans un EHPAD, ce n’est pas prévu. Ces personnes qui venaient des hôpitaux étaient des personnes âgées, elles ont participé à contaminer les autres résidents.

Au départ, le personnel n’avait rien. Aucune protection face à ce virus (gel, masque, blouse …). En plus, on laissait entrer dans l’EHPAD des personnes contaminées venant de l’hôpital. Puis j’ai vu se profiler la pression vaccinale et j’avais prévenu ma direction que de toutes façons je ne me ferai pas vacciner. On m’avait répondu : « mais non, ne vous inquiétez pas, de toutes façons on n’en est pas encore là, mais si on passe à l’obligation vaccinale on respectera votre choix, on s’arrangera ».

J’ai remplacé ma collègue au mois d’août et j’ai occupé 2 postes à la foi. J’ai travaillé comme une malade. Lorsque l’obligation vaccinale a été votée pour le personnel soignant, j’ai commencé à en reparler autour de moi en disant : « Moi je n’ai toujours pas changé d’avis, comment peut-on peut faire ? » On m’a répondu : « Si tu ne veux pas te faire vacciner, c’est une démission parce que qu’on ne va pas faire des ruptures conventionnelles à tout le monde ». J’ai terminé le remplacement de ma collègue le 31 août pour ne pas perturber les plannings et au premier septembre je ne me suis pas présentée à mon travail. J’ai reçu un courrier me demandant de justifier mon absence, puis un second.

Entre-temps j’ai attrapé le COVID et après 10 jours d’isolement j’aurais pu aller retravailler, mais je n’étais pas au courant de ces dispositions. En classant des papiers du mois d’août je me suis rendue compte, par une note interne, qu’avec un certificat de rétablissement on pouvait avoir un pass sanitaire et que j’aurais pu être exemptée de vaccination obligatoire pendant 6 mois. Ils m’ont envoyé un courrier d’entretien préalable à une sanction disciplinaire ou un licenciement. Je me suis présentée à l’entretien et on m’a demandé de justifier mon absence. J’ai répondu : « J’ai réussi à attraper le Covid, donc maintenant j’ai un pass sanitaire valide, je peux revenir travailler ». Là ils étaient un peu embêtés parce qu’ils s’attendaient à tout sauf à ça et ils m’ont dit « Bon, on va y réfléchir et on vous donnera notre réponse ».

J’ai attendu une semaine sans recevoir ni coup de fil, ni courrier, et une amie me dit « Mais tu n’as pas eu de sanction disciplinaire, tu n’as pas été licenciée. Tu as un contrat ! Pourquoi tu ne vas pas travailler tout simplement ? Tu n’as pas reçu de courrier de licenciement, tu n’as pas de mise à pied, tu as le droit d’aller travailler. »

Mon retour au travail ne s’est pas bien passé. J’ai été convoquée au bureau des ressources humaines et on m’a demandé de partir, me menaçant d’appeler la police pour me faire quitter l’établissement. Je suis restée sur mes positions puisque j’avais un contrat CDI. Ils ont appelé leur avocat et le jour même ils m’ont remis un courrier de licenciement pour faute grave. Donc aujourd’hui ce n’est pas la suspension, c’est un licenciement. Pour l’instant j’accuse le coup. C’est un peu violent et j’ai beaucoup de dommages psychologiques. Côté financier ça va encore car je ne suis pas toute seule et mon mari travaille, donc pour l’instant nous n’avons pas trop de problèmes financiers.

En revanche, au niveau psychique c’est compliqué ! Ça met un sacré coup dans la confiance en soi ; C’est compliqué de me dire que je vais me remettre à chercher un nouveau travail à mon âge ; Je veux travailler et en même temps, j’ai l’impression d’être dans un monde de dingues ! Je me sens complètement décalée par rapport à tout cette situation. Cette peur que les gens ont les uns des autres

L’une de mes collègues s’est fait vacciner avec ses 2 ados, bien avant que ne passe la vaccination pour les enfants, pour ne pas payer les tests PCR qui coûtent 100 euros et puisqu’ils devaient partir en Espagne. Elle l’a fait pour un confort de vie, pour le confort des vacances.

Ma responsable de service s’est aussi fait vacciner par rapport à ses sœurs plus âgées qu’elle, donc qui refusaient de la voir si elle n’était pas vaccinée. Depuis qu’elle s’est fait vacciner, sa sœur a un cancer de la peau de la base du cou jusqu’aux cuisses, sur tout le dos. On lui donne 10 à 15 ans d’espérance de vie, elle n’avait rien avant… Son fils, qui s’était fait vacciner aussi, la trentaine, a eu des graves problèmes au foie et il a failli être opéré. Elle m’a dit « Mon fils, il ne boit pas, il ne fume pas, je ne comprends pas ». En attendant ils le traitent avec des antibiotiques. Elle qui était pro vaccin en est revenue et ne sait pas si elle va faire la 3e dose.

Une autre collègue, qui s’est fait vacciner au dernier moment, a résisté tant qu’elle a pu mais finalement, maman de 3 enfants, toute seule, ses enfants font des études, elle s’est sentie coincée financièrement et ne pouvait pas faire autrement. Elle est très croyante et ça allait à l’encontre ses convictions religieuses. Depuis elle va très mal, elle m’a parlé d’une impression d’avoir été violée. Elle a été arrêtée un mois et demi et ne s’en remet pas.

Aujourd’hui, je ne comprends pas que dans un pays comme la France on fasse autant d’apartheid d’une catégorie de la population. On ne devrait pas discriminer sur l’état de santé.Imaginez qu’on vous dise « Tiens sortez-moi tout votre carnet de santé, voir si vous n’avez pas le VIH », parce que sinon vous ne pourrez pas être autorisé à entrer dans tel ou tel commerce. Mais enfin ça devient dingue ! Les gens affichent leur schéma vaccinal comme si c’était un Saint Graal qui vous permet d’accéder à tout ! C’est personnel !

Je ne me suis pas fait vacciner car j’ai vu aussi que dans le personnel médical, les infirmiers ou les aides-soignants, personne n’était décédé. Au bout d’un moment, nous avions des équipements de protection, des plexi-glasses, nous aérions souvent les pièces, nous avions du gel hydroalcoolique, tout ce qu’il fallait, les masques etc… On enlevait même les masques puisqu’on avait les plexis, et de fait j’étais beaucoup moins apeurée par le virus en lui-même.

Et c’est ce qui m’a fait comprendre qu’effectivement les personnes âgées décèdent, mais parce que ce sont des personnes fragiles. Les personnes âgées, il faut savoir qu’elles peuvent aussi décéder d’une gastro, de n’importe quelle autre maladie ! Il suffit qu’elles soient mal hydratées, ou même ne serait-ce que l’état psychologique. Une personne âgée peut se laisser mourir d’une dépression, le fait de ne pas voir sa famille, etc…

Moi je ne me suis dit, quitte à choper le virus, je prends le risque d’être contaminée, mais après j’aurais une immunité naturelle, plutôt que de me faire vacciner avec quelque chose d’expérimental sur lequel on n’a aucun recul. Je ne crains pas d’attraper le Covid.