Ils ont été effacés, mettons-les en lumière

Annelyse

Infirmière (Hérault)

« Ce n'est pas le virus qui a chamboulé ma vie depuis deux ans, mais ce sont bien les décisions gouvernementales. »

Annelyse a 42 ans. Elle a 20 ans d’expérience et exerce dans un centre privé. Suspendue le 25 septembre 2021 après un arrêt maladie, elle a contracté le Covid en janvier 2022 et réintégré son poste pour 4 mois. Elle est à nouveau suspendue depuis mai 2022.

Depuis toute petite, depuis l’enfance, j’ai toujours voulu être infirmière, c’était pour moi une évidence parce que prendre soin des autres c’est ce qui me fait vibrer.

Au premier confinement, au travail, nous étions tous sous le choc, mais nous étions tous là, tous prêts à relever le défi. Nous nous sommes organisés, nous ne nous sommes pas posé une seule question, toute l’équipe était là, au front. C’était évident qu’on serait là. On a organisé nos vies de famille pour être présent au travail, c’était notre priorité, en tout cas pour moi c’était vraiment ça.

Mais à la maison nous étions doublement confinés, parce que pour la première fois de ma vie j’appréhendais de dire que j’étais infirmière. Quand je le disais, les gens reculaient de trois pas, ils avaient peur de moi, ils se rendaient compte que en tant qu’infirmière, je suis au contact de la maladie et de la mort.

Pourtant, pour nous ce n’est pas nouveau, c’est notre quotidien. On prend en charge des gens malades, on s’en occupe, on les soutient, on les écoute et ça ne changeait rien. On a l’habitude de travailler avec des maladies contagieuses, de faire attention à la transmission des virus et des bactéries, de mettre des patients en isolement. Dans notre service l’hygiène est hyper importante, parce que ce sont des gens fragiles et on sait comment protéger les patients les uns des autres. J’étais en clinique privée, nous n’avons jamais manqué de matériel et l’employeur a mis en place une organisation exemplaire. On a vidé un bureau de secrétaire pour en faire un sas et ne pas mélanger les flux des infirmières qui s’occupaient des cas Covid avec celles qui soignaient d’autres patients. Nous n’avons jamais été saturés, nous n’avons pas eu de contamination Covid à l’intérieur de l’établissement, aucune transmission d’un patient à l’autre.

Au début j’ai eu un peu peur, mais petit à petit j’ai vu ce fossé entre les mesures politiques et ce qu’il se passait dans la vraie vie. Quand on ne regarde pas la télé et qu’on observe autour de soi, on n’a pas vu les gens tomber les uns après les autres. Ce n’est pas le virus qui a chamboulé ma vie depuis deux ans, mais ce sont bien les décisions gouvernementales !

J’ai été suspendue pour refus de l’obligation vaccinale, c’est-à-dire que du jour au lendemain je me suis retrouvée sans revenu. La majorité de la population semble l’ignorer ou ne veut pas le voir, mais la suspension c’est la perte immédiate du salaire. Et en plus de la violence et du stress des difficultés financières, il y a aussi tout un deuil à faire. Mon métier, c’est un métier passion et ça a été énormément de souffrances d’avoir été punie pour une faute que je n’ai pas commise. Je l’ai vécu comme une grande injustice.

Je n’avais pas l’intention de changer d’orientation professionnelle. Ma reconversion a été subie et en plus j’ai dû prendre la décision dans l’urgence. Au début j’étais sidérée bien que je l’ai vu venir, mais tant que ce n’était pas acté je n’y croyais pas vraiment, je gardais toujours l’espoir et en fait ç’est arrivé. Du jour au lendemain je n’ai plus de travail et je dois me réinventer, sauf que, en fait… Tu es en deuil… ! Pendant un temps, je n’ai fait que pleurer, pleurer… Je n’arrivais pas à me dire que je ne serai plus jamais infirmière. Cette phrase me fend le cœur, je ne peux pas me projeter. Et comme le choix c’est soit je perds mon travail, soit je me fais vacciner, je me dis qu’un mois et demi de test PCR ça m’aidera à changer d’avis, mais en fait tout mon corps me hurle que NON, je ne peux pas le faire ! Alors j’ai décidé de me reconstruire, parce que je suis comme ça, je suis dans l’action et j’ai entrepris une formation de conseillère funéraire.

Ce métier a du sens aussi, mais quand je me retrouvais à la morgue à présenter un mort à sa famille, ce mort que je trouvais beau, je regardais les mains de ce patient défunt et je me disais : « Mais moi je suis dans le vivant, j’ai envie de tenir la main de mes patients » et cette main était froide. Moi, normalement, ma place c’est auprès des patients qui sont encore en vie et que je soulage, donc j’étais tout le temps en décalage. C’est là que je me suis dit que mon deuil n’était pas encore fait.

Après mon stage j’ai obtenu le diplôme et il m’a été proposé un poste en CDI dans ce nouveau métier, mais avec une synchronicité incroyable j’ai contracté le Covid et obtenu le pass de rétablissement valable 4 mois. La grande question c’était « Est-ce que je change de voie et j’accepte le CDI où est-ce que je retourne dans mon poste ? », en me disant que c’est temporaire et que j’allais retravailler avec cette épée de Damoclès. Après trois ou quatre jours de torture morale c’était une évidence, j’étais obligée de retourner à mon travail.

J’étais hyper contente de revenir et dans l’ensemble j’ai été très bien accueillie, mais sur toutes les lèvres la première question c’était : « Est-ce que tu t’es fait vacciner ? ». Les réactions étaient alors diverses : « Ah, tu déranges, tu n’es toujours pas vaccinée », ou au contraire « Merci, tiens bon parce que mine de rien tu nous représentes. » Quelques-uns, très peu malgré tout, ont été carrément malveillants : « Tu es pire que quelqu’un qui prend le volant en ayant bu ! », ou : « Tu mets les gens en danger, tu es profondément égoïste », ou encore : « Si je fais vacciner mon enfant c’est à cause des gens comme toi, qui refusent de se faire vacciner ! » Moi j’ai dit : « Je ne prends pas cette responsabilité-là, si tu choisis de faire vacciner ton enfant tu prends ta responsabilité, mais ce n’est pas à cause de moi. Si vraiment tu as peur de moi, tu ne me fréquentes plus. »

D’autres propos ne m’étaient pas adressés ouvertement mais ils m’ont été rapportés : « Si Annelyse est réintégrée on trouvera ça dégueulasse, parce que nous on a fait l’effort de faire les trois doses. » Ce sont des gens qui n’étaient pas au clair avec eux-mêmes, qui l’ont subi et qui m’en veulent d’avoir su résister. J’ai répondu : « Vous direz quand même à ces gens-là qu’ils ont accepté les 3 doses mais conservé leur emploi, il faut prendre le paquet complet, parce que moi j’ai été suspendue et j’ai perdu 6 mois de salaire ! » Une autre collègue m’a dit : « Tu as un certificat de rétablissement et ça ça vaut pour 3 doses ? » J’ai répondu que je ne fais pas les lois.

De retour à mon poste, les patients qui s’étaient inquiétés de moi m’ont accueillie avec plaisir et m’ont démontré, par leurs compliments, que j’étais une bonne infirmière : « Ah je suis contente de vous voir » – « J’aime bien quand vous êtes là » – « J’aime me confier à vous. » Tout ça ne s’invente pas, ça fait tellement plaisir, ça fait partie de ce que les gens te donnent. Mais on m’avait conseillé de ne pas parler aux patients des raisons de mes 6 mois d’absence.

Un jour j’ai travaillé avec une infirmière qui avait le Covid avec des symptômes, courbatures, mal à la tête etc., donc triple vaccinée, Covid positif, symptomatique, mais en train de travailler. Ce soir-là j’ai pleuré parce que ça ajoutait encore à l’injustice que je subissais. Moi j’étais prête à travailler tous les jours en faisant le test et là, ma collègue malade auprès des patients ça ne pose de problème à personne ! J’avais envie de hurler à l’injustice, à la stupidité de ces mesures, parce que laquelle des deux met le plus les patients en danger ?

Le plus difficile c’est l’indifférence des gens, c’est tuant, c’est incroyable. Après la phase de sidération, il y a eu la colère, le fait que personne ne bouge. Les gens continuent à vivre autour de toi, ils sont contents parce qu’on a enlevé quelques petites mesures de restrictions, ils ne se rendent pas compte. La majeure partie de la population a accepté non seulement la vaccination obligatoire, toutes les mesures coercitives du gouvernement, mais aussi qu’une partie de la société soit mise à l’écart, y compris ses propres soignants, qu’elle a pourtant applaudis lors du premier confinement. Quand tu fais un travail dans lequel tu t’épanouis, que tu te sens utile à la société et qu’on te prive de ça… J’ai vécu ça comme une grande violence, nous avons été mis au ban de la société, les gens ont peur de nous ! J’ai aussi perdu des amis qui ne voulaient plus me voir parce que je n’étais pas vaccinée.

Mon refus de la vaccination est une décision personnelle et s’il n’y avait pas eu ce chantage travail/pas travail je ne me serais même pas posé la question. Pour moi c’était une évidence, je n’avais pas besoin de me faire vacciner, notamment parce que j’ai des problèmes de santé et que dans mon cas la balance bénéfice-risque n’est pas en faveur de la vaccination. J’ai aussi appris à allier la médecine occidentale et les médecines alternatives, qui pour moi sont complémentaires. J’entretiens mon système immunitaire et dès le premier confinement j’ai pris des compléments pour renforcer mon immunité naturelle. Et puis c’est aussi par amour de la liberté. C’est très important de laisser le choix aux gens, on ne peut pas donner un consentement libre et éclairé lorsqu’on est menacé de perdre son salaire !

Certaines de mes collègues se sont fait vacciner spontanément parce qu’elles avaient peur du virus, elles croyaient en ce vaccin, ça les a soulagées et c’est sans doute très bien pour elles, mais une sur deux c’était uniquement pour ne pas perdre leur salaire, quelques-unes aussi parce qu’elles voyagent beaucoup. Finalement, moins de la moitié s’est fait vacciner par conviction pour ce vaccin. Toutes les autres, c’était sous la contrainte, parce qu’il y avait le chantage du salaire.

Le consentement libre et éclairé est d’autant plus important que ce vaccin est une technologie nouvelle encore en phase expérimentale. Pour assumer son choix il faut prendre ce risque en toute connaissance de cause, parce que Pfizer ou l’état pourront vous dire un jour : « Mais on vous a laissé le choix ». Et c’est là toute la perversité de la chose ! Si demain mes collègues qui se sont fait vacciner ont des effets secondaires importants, elles vont dire : « Mais j’étais forcée sinon je perdais mon salaire » et l’État, ou Pfizer, ou je ne sais qui diront : « Mais vous n’étiez pas obligée, regardez, il y en a qui ne l’ont pas fait, qui ont été suspendues sans salaire, donc vous avez choisi, vous n’y étiez pas obligée en fait ».

Ce qui est terrible c’est qu’il y a une omerta autour de ce vaccin, on ne peut pas discuter. Quand tu te fais opérer, le chirurgien te donne une feuille en précisant les risques et tu signes un papier comme quoi tu les acceptes et là on te dit « Non, non, vous ne risquez rien, il faut vous protéger, vous et tout le monde. » Et le pire c’est qu’on vous culpabilise.

Refuser ce vaccin expérimental c’est d’abord rester en accord avec moi-même, ne pas me trahir, être en cohérence avec mes choix, mes valeurs, mes ressentis, mes convictions.